A l’attaque – France – 1999 – 1 h. 30 – Couleurs
Deux amis scénaristes aux caractères antagonistes font le pari d’écrire aujourd’hui un film politique. Les difficultés sont grandes ; les pièges abondent. Leurs errements, querelles, réconciliations viendront sans cesse se mêler à l’histoire exemplaire du garage « Moliterno & Cie ». Gigi et Jean-Do réparent des voitures que Lola fait ensuite briller pendant que Marthe établit les factures. Le grand-père apprend au bébé des chansons révolutionnaires italiennes pendant que Vanessa et Mouloud vendent des fleurs et des oursins sur les marchés. Toute la famille sue sang et eau, douze heures par jour, sept jours sur sept pour survivre en ces temps de chômage. Mais mondialisation oblige… une multinationale menace ce radeau de la méduse. Nos héros vont prendre les armes et, soutenus par toute la population, triompher comme il se doit dans les contes de l’Estaque.
L’impression de familiarité est immédiate. À première vue, depuis Marius et Jeannette, rien n’a changé à L’Estaque. La bande à Guédiguian est au complet. Il suffit de les voir apparaître, Ariane Ascaride, Gérard Meylan, Jean-Pierre Darroussin… Toute une humanité malmenée mais batailleuse. C’est l’univers très identifiable désormais, du cinéaste marseillais. Même ce garage Moliterno qu’on n’avait jamais vu, on a l’impression de le connaître.
Quand le rideau se lève (au sens propre) sur les premières images, les Moliterno et assimilés, Lola, Gigi, Jean-Do, Marthe, Pépé, n’existent pas. Ils sont à créer. Ce à quoi s’emploient deux hommes, un auteur-metteur en scène et son coscénariste, qui en sont aux prémices. À l’attaque !, c’est donc l’histoire de l’accouchement d’un film. Les auteurs qui inventent leurs personnages sous nos yeux, c’est mieux qu’un truc de narration : Robert Guédiguian installe ainsi une distance féconde qui lui permet à la fois de plonger le spectateur dans la ‘cuisine’ d’un scénario naissant et de donner libre cours à la fantaisie la plus ludique. Tout est possible puisque rien encore n’existe.
Ce ne sont pas tant les péripéties que la manière dont les auteurs les conduisent qui amuse. On suit le cheminement hasardeux d’une inspiration qui trébuche, s’offre des apartés rigolards, grinçants ou délibérément puérils. Ce libre parcours ne s’embarrasse pas de théorie. À l’Attaque ! est un jeu. Mais où le cinéaste glisse astucieusement deux ou trois choses qu’il avait envie de dire sur son travail. Guédiguian défend à tout crin le droit au rêve, à l’utopie joyeuse. S’il milite aujourd’hui, c’est aussi pour un cinéma auquel il voudrait continuer de croire, un cinéma ‘accueillant’. Bienvenue au garage Moliterno.
Réalisation : | Robert Guédiguian |
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Scénario : | Jean-Louis Milesi, Robert Guédiguian |
Photographie : | Bernard Cavalié |
Musique : | Jacques Menichetti |
Montage : | Bernard Sasia |
Interprètes : | Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan, Pascale Roberts, Jacques Boudet, Denis Podalydes, Frédérique Bonnal, Jacques Pieiller, Pierre Banderet, Leatitia Pesenti |