30/11/2009 – Parfum de femme

Parfum de femme (Profumo di Donna) – Italie – 1974 – 1 h. 43 – Couleurs

Fausta est un bel homme, dans la force de l’âge qui vit seul avec sa vieille tante à Turin. Sept ans auparavant, capitaine de cavalerie, il a perdu la vue et la main gauche en manipulant une bombe lors des grandes manœuvres. Détestant l’uniforme, il dissimule son amertume sous une agressivité permanente. Giovanni, jeune ordonnance de 18 ans, que Fausto surnomme Ciccio, est chargé de l’accompagner au cours d’un voyage en train Turin-Gênes-Rome-Naples, dont le but reste mystérieux, et doit subir en silence les caprices du capitaine. Ciccio est stupéfié, car cet aveugle « voit » tout : les obstacles, les réactions des gens et, surtout, les femmes dont il devine la présence grâce au parfum qu’elle dégagent.

Cette comédie grinçante qui va finir – comme un film de Chaplin – dans l’émotion la plus sûre, le pathétique le plus déchirant, serait déjà une réussite par la seule peinture de son héros. Elle est aussi un merveilleux poème, comme le titre le suggère (Profumo di Donna, tellement plus beau en italien !). Ce qui surprend le petit compagnon du capitaine, c’est que celui-ci devine tout ce qui l’entoure avec une lucidité suspecte (dont Risi tire des moments comiques extraordinaires). On dirait qu’il voit. On en oublierait presque son infirmité, que Gassman pourtant nous rappelle par un strabisme épisodique, ce regard perdu qui donne tant de noblesse à certains aveugles. Bref, l’expédition qui nous mène du nord au sud de l’Italie est aussi un voyage initiatique. On y apprend à combiner nos cinq sens autrement. À percevoir le monde par toutes les fibres de notre corps et, paradoxe pour un cinéaste – mais combien fécond -, à explorer un univers de sensation, bien au-delà du regard.Cette conversation des sens, certains cinéastes l’auraient provoquée par le manque (en nous privant justement de voir). Risi, généreux et bon vivant, nous comble au contraire d’images somptueuses : la campagne qui défile à la fenêtre du train, la douce pluie qui apaise la brûlure de l’été, la terrasse napolitaine face à lamer, avec sa profusion de fleurs et de lumière qui change d’heure en heure…

Études Cinématographiques

Réalisation :Dino Risi
Scénario :Ruggero Maccari et Dino Risi d’après le roman de Giovanni Arpino
Photographie :Claudio Cirillo
Musique :Armando Trovaioli
Interprètes :Vittorio Gassman, Alessandro Momo, Agostina Belli, Moira Orfei, Franco Ricci, Éléna Véronèse, Lorenzo Piani, Stefania Spugnini