Un monde fouf fou fou…
Expliquons ce titre qui n’a pas vocation à explorer la folie mais le cinéma. Dès le début de l’histoire du cinéma commence la rivalité entre les mini-documentaires des Frères Lumières et les Fantaisies magiques de Georges Melies. Deux voies qui n’ont cessé de diverger. C’est à la seconde voie que nous allons consacrer à la saison 2011-2012 du Ciné Club Jean Vigo, tout en sachant qu’elle emprunte parfois à la première voie pour mieux installer l’illusion et parfois la confusion dans votre perception.
Les premiers hérités de Melies furent les acteurs et les auteurs du burlesque qui épuisèrent la folie du mouvement au point de le rendre brownien par le principe d’accumulation : un homme qui tombe en trébuchant c’est drôle, cent hommes qui tombent simultanément c’est une vision du monde. Hélas cette folie jubilatoire de la destruction fut rapidement oubliée au profit d’un réalisme à but normalisateur donnant à la société un reflet apaisant, voire somnifère. Mais il y a toujours un courant sous-marin qui, soudain, déchaine des tsunamis cachés. Il s’agit donc de dérèglement de la perception et de l’organisation de la représentation que l’artiste nous propose selon Arthur Rimbaud : « Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens… Ses visions ils les a vues. ».
Risquons un classement :
- Le burlesque comme dynamitage du réel :Monty Python, Steamboat Bill Jr, La panthère rose, Jour de fête.
- Le huis-clos, la difficulté d’être un homme : L’ange exterminateur, Dodes’Kaden, Le Procès.
- L’espace du fantastique, décalage spatio-temporel : Abattoir 5, la Clepsydre, Dead Man, Désert Rouge, Tous en scène.
- Les métamorphoses du grotesque, du carnavalesque et de l’horreur : Blue Velvet, Satyricon, Chat Noir Chat Blanc.
Comme on le voit cela à contaminé tous les genres que l’on retrouvera dans l’échantillon prélevé cette année sur les classiques du répertoire (“le fantastique”, la comédie dite « américaine », la science-fiction, le film de genre, la comédie musicale).
Des dérèglements donc qui par leur répétition nous disent que le monde objectif n’est autre que ce que nous montre l’objectif de la caméra. Pour paraphraser disons que la folie a ses raison que la raison ignore. Tout cinéphile a un jour été emporté par cette vague et depuis il surnage à la recherche de nouvelle découvertes. C’est ce que l’on vous souhaite cette année.
Henri Talvat
| Film | Réalisateur |
|---|---|
| Blue Velvet | David Lynch |
| Steamboat Bill Jr | Buster Keaton et Charles Reisner |
| Désert Rouge | M. Antonioni |
| La Clepsydre | Wojciech J. Has |
| Dead Man | Jim Jarmusch |
| Monty Python, Sacré Graal | Terry Gilliam et Terry Jones |
| Tous en scène | Vincente Minnelli |
| Abattoir 5 | George Roy Hill |
| L’ange exterminateur | Luis Buñuel |
| Dodes’kaden | Akira Kurosawa |
| Satyricon | Federico Fellini |
| Le procès | Orson Welles |
| Chat Noir, Chat Blanc | Emir Kusturica |
| Quand la panthère rose s’emmêle | Blake Edwards |
| Jour de Fête | Jacques Tati |